Laboratoire Photo
Galerie Deux Poissons est heureuse de présenter l’exposition Laboratoire Photo qui réunit les artistes Michelle Bui, Edward Maloney et Alana Riley. Suivant la formule inaugurée par Laboratoire Peinture, cette deuxième exposition thématique permet de mettre en valeur des œuvres d’artistes de talent aux pratiques divergentes que seul unit le médium de prédilection. L’objectif de ce contexte de présentation est de faire un état des lieux de la discipline sous la lentille d’une mise en espace illustrative examinant comment les jeunes artistes professionnels d’aujourd’hui investissent la tradition et l’histoire de leur technique.
Michelle Bui crée des images qui allient candidement splendeur et répugnance, exhibant leur beauté pour mieux cacher à la vue de tous les éléments grotesques nageant sous leur surface. Ces natures mortes — compositions d’objets réels et postiches, organiques et inorganiques — se lisent comme de complexes stratifications, dont les diverses couches révèlent autant de réflexions sur le design, la publicité et la mode. L’exploration de l’histoire de la nature morte elle-même, des perspectives classiques et contemporaines de la représentation et de l’abstraction, des contraintes formelles et de l’évolution des styles y sont proposées au spectateur sous forme de pure délectation visuelle.
Les paysages énigmatiques d’Edward Maloney mettent en relation les recherches intellectuelles du pictorialisme et du conceptualisme contemporain en photographie. Décomposant le paysage en unités de sens encodées dans lesquelles sont programmés divers récits invisibles, l’artiste arrive à un résultat captivant dont le mystère ne se laisse pas facilement percer. L’ambiance de ces photographies suggère plusieurs interprétations possibles au spectateur, hypnotisé par l’usage de la couleur, de la composition et de l’atmosphère. Frôlant l’abstraction sans jamais s’y soumettre totalement, ces pixellisations se révèlent à l’esprit en d’obscurs souvenirs et monuments.
Le projet évolutif d’Alana Riley constitue une analyse conceptuelle et hautement théâtrale d’un souvenir qui l’habite depuis 2003 : sur un traversier, l’artiste entend la conversation d’un couple d’inconnus, émue par la tendresse de leur interaction, elle se met à prendre en note leur dialogue et à documenter ses observations. En 2018, elle retrouve ses notes de l’époque et s’attèle à la reconstitution de son expérience par la création de nouveaux portraits de personnages et la collecte de documents d’archives de paysages de 2003, redonnant ainsi vie à ce souvenir vieux de quinze ans. À travers un travail habile de la mise en scène et l’embauche de comédiens professionnels, l’artiste conjure, faute de pouvoir la reproduire dans son intégralité, le sens que cette expérience a eu pour elle. Ce faisant, elle tisse au profit du spectateur un fascinant réseau de renvois et d’introspections, véritable tapisserie de souvenirs, de nostalgie et de joies.